Florent Garcia (Youtubeur et guitariste) : « YouTube me permet de transmettre mes connaissances »
Avec plusieurs centaines de milliers de vues par vidéo, Florent Garcia est devenu en quelques mois l’un des guitaristes les plus regardés du YouTube francophone. Proposant un contenu à la fois ludique et pédagogique, l’ancien élève de l’Académie Rainier III a trouvé avec ce format un moyen de transmettre sa passion. Rencontre.
Est-ce que vous vous souvenez du moment où vous avez découvert la guitare (comme auditeur ou simplement quand vous en avez vu une pour la première fois), est-ce qu’il y a eu un phénomène de fascination ?
L’ un de mes premiers jouets était une petite guitare en plastique, et je me rappelle avoir toujours été attiré ne serait-ce que par la forme de l’objet, avant même de me poser des questions de son ou d’harmonie. Donc effectivement je pense que l’on peut clairement parler, si ce n’est de fascination, de phénomène d’attraction depuis toujours.
Quel(s) artistes(s) ou disque(s) vous ont donné goût à la musique ?
Enfant j’aimais beaucoup écouter les bandes originales de films que j’aimais, notamment les compositions de John Williams, Ennio Morricone, etc. Puis je pense que le déclic qui m’a réellement fait m’intéresser à la pratique d’un instrument est arrivé au début de l’adolescence au collège, quand mon frère et mes parents ont commencé à me faire découvrir des groupes de rock et de punk-rock. J’ai tout de suite accroché aux grands classiques AC/DC, Metallica et autres, et j’écoutais aussi beaucoup de la scène pop-punk des années 2000, comme Green Day ou Sum41.
Je pense que les outils technologiques mis à notre disposition grâce à internet sont réellement en train de changer drastiquement un grand nombre d’activités, quelle que soit leur nature.
Pouvez-vous nous raconter votre parcours à l’Académie Rainier III ?
J’ai intégré ce que l’on appelle les CHAM (classes à horaires aménagés) à 6 ans, c’est une section qui offre la chance à certains enfants sélectionnés de bénéficier de deux demi-journées d’études musicales par semaine. C’est un enseignement classique, et bien que le savoir acquis me soit aujourd’hui toujours d’une grande aide, j’ai préféré me désolidariser de cette formation arrivé au collège, tout simplement parce que je sentais que j’avais besoin d’une approche différente de la musique. C’est seulement après avoir passé plusieurs années à jouer en groupe, et à travailler de manière autodidacte l’instrument que j’ai réintégré l’académie de Monaco, mais du côté du département jazz et musiques actuelles.
Vous y êtes titulaire du DEM musiques actuelles amplifiées, dont vous êtes le premier élève guitariste diplômé? Pouvez-vous nous parler de cette filière et des professeurs qui vous ont accompagné pendant votre cursus ?
La spécialisation en musiques actuelles est une formation très récente pour Monaco, bien que le diplôme existe depuis quelque temps déjà dans certains conservatoires de France. J’ai eu la chance d’être encadré dès mon arrivée à l’académie par Jean-Michel Aublette qui en plus d’être un excellent musicien, est aussi un excellent pédagogue, ainsi que par le professeur de guitare Luc Fenoli. Et c’est l’arrivée il y a quelques années de Frédéric Luzignant, également responsable du pôle musiques actuelles du conservatoire à rayonnement national de Nice qui a permis l’ouverture de cette formation, sous la direction de Christian Tourniaire, directeur de l’académie de musique de Monaco.
Personnellement je vois ce diplôme avant tout comme un rite de passage, une confirmation d’acquis de connaissances n’étant au final qu’une étape dans la vie d’un musicien.
Est-ce qu’en parallèle de votre chaîne, vous menez une activité de professeur ? Si oui, est-ce que vous utilisez également Skype ou les nouvelles technologies pour des cours/conseils à distance ?
Effectivement j’enseigne jusqu’à maintenant dans deux écoles de musique, et propose en plus des cours particuliers par correspondance via Skype, Facetime, ou autre. Je pense que les outils technologiques mis à notre disposition grâce à internet sont réellement en train de changer drastiquement un grand nombre d’activités, quelle que soit leur nature. C’est un véritable plaisir de pouvoir échanger des connaissances avec des musiciens habitant parfois à l’autre bout de la planète, et cet accès globalisé au savoir est en train de façonner directement l’évolution de tous les domaines artistiques et culturels.
Comment est née l’idée de créer une chaîne YouTube ?
L’idée est venue assez simplement, en enseignant la musique, on se rend vite compte que certaines interrogations reviennent très régulièrement chez les élèves. De plus j’ai toujours été un gros consommateur de contenus en ligne, je ne regarde plus la télévision depuis plus de 3 ans, ayant remplacé des programmes tv parfois assez vides de sens, par du contenu que je sélectionne, consomme quand je le souhaite, et qui apporte directement des pistes de réflexion à mon travail. C’est donc assez rapidement que j’ai décidé d’apporter ma pierre à l’édifice en traitant assez simplement des interrogations de mes élèves en vidéo, puis en les postant sur la plus grosse plateforme de contenu en ligne, YouTube.
Utiliser l’héritage de l’instrument pour créer quelque chose de nouveau, c’est ça que j’admire.
Vos vidéos sont très élaborées en termes de prise de son, de travail de montage, et aussi bien sûr de méthodologie et de construction « narrative ». Comment se passe leur élaboration, êtes-vous seul pour l’ensemble de la réalisation et du montage, et combien, en moyenne, de temps passez-vous sur une seule vidéo, entre écriture, tournage et montage ?
J’ai toujours été passionné par le cinéma, et plus globalement par la vidéo, que ce soit par les rouages de la narration, que par la technique directement. C’est pourquoi je mets un point d’honneur à ce que mes vidéos soient les plus agréables possible à visionner pour mes spectateurs, selon moi la forme est aussi importante que le fond. Je suis effectivement seul pour l’ensemble du processus de création, c’est un mode de fonctionnement extrêmement chronophage, mais que me permet de garder le contrôle à 100% du contenu que je crée, ce qui est pour le moment ma plus grande priorité. À raison d’une vidéo postée sur YouTube par semaine, et d’environ deux vidéos sur Instagram, je passe en moyenne trois à quatre jours pleins par semaine à travailler sur ce contenu, en plus de mes autres activités.
Votre chaîne utilise des exemples insolites (le cinéma, des solos réalisés par des non-guitaristes comme Lil Wayne, etc), mais avec toujours des explications sur le choix de phrasé, de la pédagogie côté harmonie, solfège, technique… C’est une pédagogie que vous avez-vous-même reçue ? Est-ce que les leçons de guitare que vous donnez ont cette même façon d’aborder la musique ?
Ce n’est pas forcément une approche pédagogique utilisée en conservatoire, mais plus ma vision de la musique. J’ai bien sûr cette approche-là pendant mes leçons. Il y a beaucoup de manières d’appréhender la musique et la théorie musicale, personnellement j’aime cette approche instinctive basée sur l’écoute et la pratique. Beaucoup de gens se retrouvent dans cette approche qui permet de démystifier la théorie, et d’avoir un apprentissage plus ludique que rébarbatif. Il ne faut jamais perdre de vue que, si l’on fait de la musique, c’est avant tout pour s’amuser et prendre du plaisir.
Quel point commun retrouvez-vous entre vos guitaristes préférés ?
Si sa musicalité me touche, alors j’aime me pencher sur son travail et m’inspirer de sa manière de jouer, mais en premier lieu je laisse toujours place à l’émotion plus qu’à la réflexion, c’est d’ailleurs à ça que je dois, je pense, l’éclectisme de mes goûts. Je pense que le point commun à tous mes musiciens préférés, c’est avant tout la sincérité et l’unicité de leur jeu. Je trouve ça admirable de pouvoir puiser son inspiration chez des artistes célèbres tout en réussissant à avoir une véritable personnalité lorsque l’on joue, et c’est le cas par exemple de Jeff Beck, John Mayer, Mateus Asato… Chacun de ces guitaristes a des inspirations évidentes, et pourtant il est possible de les reconnaître au bout de deux notes. Utiliser l’héritage de l’instrument pour créer quelque chose de nouveau, c’est ça que j’admire.
Aujourd’hui vous animez, en dehors de la chaîne YouTube, un compte Instagram. Des vidéos courtes, sans explication, juste vous et votre guitare. C’est un moyen de vous exprimer comme instrumentiste de façon simple et sympa ?
Jusqu’à maintenant, YouTube me permet de transmettre mes connaissances, et Instagram ma musique. Je pense que les limitations imposées par les réseaux (durée d’une vidéo Instagram limitée à une minute par exemple) sont un très bon moyen de stimuler la créativité des utilisateurs. Ce que recherche le public de nos jours c’est avant tout la sincérité et la proximité avec les artistes, et les réseaux sociaux sont des outils construits autour de cette idée de rapprocher les créateurs de contenus, et leur audience.
Vous avez étudié les musiques actuelles à Monaco. Que pouvez-vous nous dire sur la vie musicale de la Principauté ? Est-ce qu’il y a des salles voire des bars qui se prêtent bien à la musique live ? SI oui, lesquels ?
Bien que les choses évoluent dans le bon sens, je pense qu’il y a encore beaucoup de choses à créer pour la vie musicale de la principauté. La possibilité d’assister à des concerts d’exceptions au Sporting, ou à l’opéra Garnier est une chance, mais c’est une chance relativement couteuse. Pour ce qui est de la vie musicale locale, des soirées comme les apéros concerts à l’espace Léo ferré offrent la possibilité de découvrir des artistes dans un cadre très agréable, mais trop peu de salles/bars offrent la possibilité de voir de la musique live et préfèrent se tourner vers un business model plus rentable orienté club/boite de nuit. Nous sommes encore nombreux à pleurer la disparition du Moods, dans lequel sont venus des artistes incroyables. Au final l’un des meilleurs plans monégasques pour voir des musiciens d’exception à un tarif raisonnable reste le Jazz Festival de la Note bleue qui a lieu l’été sur la plage du Larvotto.
La proximité du Mercantour est aussi une des forces de la région, et me permet de changer d’air assez rapidement quand j’en ressens le besoin.
Et dans les Alpes-Maritimes ?
Je pense que la région commence à se défendre sérieusement en ce qui concerne les festivals. Que ce soit le Nice Jazz Festival ou Jazz à Juan, la programmation est toujours de qualité. Pour voir du live à plus petite échelle, de nombreux bars du vieux Nice ainsi que des salles comme la Zonmé offre l’opportunité de se produire pour les artistes locaux, et permet souvent d’assister à d’excellents concerts.
Un lieu de la région où vous aimez aller pour vous promener ?
J’habite à 5 minutes de la Tête de Chien au-dessus de Monaco, donc évidemment, c’est ma balade de prédilection. Étant au contact des écrans et de la technologie quotidiennement, j’essaie surtout de trouver des endroits calmes et préservés pour me promener, je fuis globalement les environnements trop urbains. La proximité du Mercantour est aussi une des forces de la région, et me permet de changer d’air assez rapidement quand j’en ressens le besoin.
Un petit morceau à conseiller à nos lecteurs qui veulent écouter un peu de guitare électrique après vous avoir lu ?
Le premier single de mon EP « Lune » vient de sortir sur toutes les plateformes de streaming, et le clip est disponible à cette adresse : https://www.youtube.com/watch?v=L5TnpI3kgYI
Les prochains morceaux arriveront dans les semaines à venir sur ma chaîne YouTube !
Les vidéos de Florent Garcia sont à retrouver sur sa chaîne YouTube
et son compte Instagram @florent.gar