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Portrait

Yakuba Ouattara ou le voltigeur du Rocher

Ouattara
Photo AS Monaco Basket

À vingt-huit ans, Billy Yakuba Ouattara en est déjà à son deuxième passage à l’AS Monaco, un club qu’il porte en estime dans son cœur. Après une parenthèse délicate en NBA, l’athlétique arrière (1m92) international français (10 sélections) est désormais prêt à dunker le Rocher, pour offrir à la Roca Team son premier titre de champion de France. Monaco-Tribune est parti à sa rencontre. Portrait.  

À ce moment-là, il ne s’y voyait pas. Il s’imaginait faire carrière dans la boxe. Le basket-ball ? Il le pratiquait, bien-sûr. Mais entre amis, le soir, dans la « street », comme il aime le rappeler. À douze ans, Billy Yakuba Ouattara était encore loin des parquets de Pro A, des séances d’entraînements aux États-Unis avec le maillot des Brooklyn Nets sur les épaules frappé Ouattara dans le dos ou des rendez-vous avec l’équipe de France, aux côtés des Tony Parker et autre Boris Diaw. Mais l’aventure a commencé, presque sur un coup de tête, bien au-delà des playground du sixième arrondissement de Lyon, dans le sillage d’un pote d’enfance, son meilleur ami, parti s’inscrire dans un club de basket, le CLAR Lyon Basket. « C’est à partir de là que je suis tombé amoureux du basket, se souvient le natif de Tepa, une petite ville fermière dans l’ouest du Ghana. J’aimais bien regarder les highlights de la NBA. J’adorais Tracy McGrady, Vince Carter et Lebron James. »

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Un passage contrasté aux États-Unis

Du rêve à la réalité, des vidéos aux parquets, il n’y a parfois qu’un pas, que Yakuba Ouattara a franchi, il y a deux saisons, en traversant l’Atlantique, direction les Brooklyn Nets, franchise du meneur All-Star d’Angelo Russell, aujourd’hui chez les Wolves de Minnesota. « C’est quelque chose d’extraordinaire de pouvoir jouer en NBA. C’était un rêve de gosse. J’ai adoré mon expérience là-bas, même si cette blessure m’a laissé beaucoup de frustration et un sacré goût d’inachevé… » La parenthèse dans l’arrondissement le plus peuplé de la Big Apple a tourné court. Blessé quelques jours après ses grands débuts, celui qui avait signé un « two-way contract », lui permettant de jouer à la fois pour Brooklyn, en NBA, et pour les Long Island Nets, en G-League (l’ancienne D-League, sorte de deuxième division), est coupé par les Nets, avant même d’avoir pu écumer les parquets de la grande ligue américaine. Non, Billy Yakuba Ouattara ne croisera pas ses idoles, Vince Carter et Lebron James.

En subissant la dure loi de la NBA, le gamin des playground de Lyon prend un sacré coup derrière la tête, et décide de resigner en G-League pour terminer la saison. Là-bas, au sein d’une Ligue individualiste, où l’esprit d’équipe se limite aux noms cochés sur le papier, Ouattara se sent à l’étroit. « Ce n’est pas le basket que j’aime. Tout le monde veut se montrer. Il y a plus de concurrence et de rivalité au sein de ta propre équipe que face aux équipes adverses. » Après une saison loin de la France, l’athlétique arrière songe à rentrer, pour se relancer. Direction la Côte d’Azur, et l’AS Monaco, un club qu’il connaît bien et qu’il affectionne énormément. Parce que oui, avant de franchir le pas et de rejoindre la NBA, Yakuba Ouattara faisait déjà les beaux jours de la Roca Team.

Entre Yakuba Ouattara et la Roca Team, une véritable histoire d’amour

Après des débuts en Pro A sous le maillot de l’Élan Chalon, club qu’il a rejoint à ses seize ans après avoir « envoyé des CV à tous les clubs français en espérant une réponse positive » qui est finalement arrivée un matin par la poste, Yakuba Ouattara rejoint Denain, en Pro B, lors de la saison 2014-2015. Au terme d’une année magistrale, tant personnellement que collectivement, le jeune arrière commence à se faire un nom et un prénom, et fait logiquement son retour en Pro A. « Ce qui est marrant, c’est qu’à l’époque, je ne me voyais pas du tout jouer là-bas, se marre-t-il, en évoquant cette Roca Team, qu’il a appris à chérir avec le temps. Les retours n’étaient pas forcément bon. J’entendais souvent qu’à Monaco, on ne bossait pas beaucoup. Mais Zvezdan Mitrovic (aujourd’hui entraîneur du LDLC ASVEL) a su me convaincre et me faire changer d’avis. À l’arrivée, cela a été le meilleur choix de ma carrière. »

Sous le maillot rouge et blanc, Yakuba Ouattara explose aux yeux du grand public. Déjà réputé pour sa faculté à dunker dans toutes les positions, « j’ai ça en moi, je ne travail même pas mes dunks à l’entraînement », celui qui a remporté à deux reprises le concours de la célèbre figure lors des All-Star Game 2014 et 2015, fait également l’étalage de sa faculté à enquiller des points. 12,3 points de moyenne par match lors de sa première saison, 11,1 points lors de la seconde, Yakuba Ouattara est aussi un artilleur qui pèse sur la Pro A et qui conduit l’AS Monaco jusqu’en finale du championnat, en 2018, en plus des deux Leaders Cup glanées consécutivement en 2016, 2017 et 2018 aux côtés d’une génération exceptionnelle. Alors forcément, au moment de rentrer en Europe et en France, Yakuba n’a pas réfléchi une seule seconde. Ce sera Monaco et rien d’autre. « Je n’avais que cette idée en tête, souffle-t-il. J’avais besoin de stabilité. Monaco est un club qui me correspond parfaitement. Un club familial, avec un staff, des joueurs et un public merveilleux. »

L’équipe de France dans un coin de la tête

Sur le Rocher, l’ex des Brooklyn Nets est revenu avec un souhait, une ambition, une raison. « Remporter le titre de champion de France, forcément. J’ai le sentiment que le travail n’est pas terminé. Je ressens un goût d’inachevé. Je rêve d’offrir à Monaco son premier titre de champion de France. Il ne faut pas oublier que nous sommes un club jeune, qui évoluait encore en Pro B il y a quelques années. Les résultats obtenus depuis plusieurs saisons sont déjà extraordinaires. » Des performances en club qui pourraient le conduire à nouveau en équipe de France, lui qui compte dix sélections avec les Bleues. « C’est quelque chose d’énorme que de pouvoir représenter son pays. Je n’ai pas de mots pour d’écrire cette sensation. J’aimerais beaucoup disputer les Jeux Olympiques. La concurrence à mon poste est féroce. Mais je veux prouver que j’ai ma place dans cette équipe. » En tout cas, à Monaco, Yakuba Ouattara semble avoir fait son nid, tout là-haut, sur ce Rocher, qu’il aime tant admirer depuis son arrivée, lui, le monégasque d’adoption.