Récit

Monaco fait face à la pandémie

Monaco covid19
DR

À ce jour, la Principauté de Monaco compte 12 cas avérés de Coronavirus, dont le Prince Albert II qui a été testé positif en début de semaine. Le Gouvernement Princier prend des mesures inédites pour faire face au chaos suscité par la pandémie. 

Après le Ministre d’État Serge Telle, c’est au tour du Prince d’être testé positif au COVID-19. Le Palais Princier affirme toutefois, avec l’appui de l’équipe médicale du Centre Hospitalier Princesse Grace, que « l’état de santé [d’Albert II] n’inspire aucune inquiétude ». Placé en quarantaine et confiné dans ses appartements princiers, le chef de l’État monégasque travaille donc, comme beaucoup, à distance.

Publicité

Le Rocher, lui aussi confiné

Son gouvernement a d’ailleurs pris toutes les mesures qu’impose le risque de contamination dû au Coronavirus. Dès ce mercredi minuit, « les lieux recevant du public, non-essentiels à la vie du pays » sont fermés jusqu’à nouvel ordre. C’est notamment le cas des casinos, bars et restaurants. Le Rocher n’est donc pas épargné, et suit la trajectoire inéluctable déjà empruntée par l’Italie et la France avant lui. Plus tard dans la semaine, le Gouvernement a interdit tous les accès au littoral et aux rivages de la Principauté. En somme, les monégasques se voient contraints au confinement de plus en plus restrictif.

Réorganisation inédite du Centre hospitalier Princesse Grace

En conséquence, les centres médicaux de la Principauté sont plus réquisitionnés que jamais. Si les deux premiers cas de Coronavirus avaient été pris en charge par le CHU de Nice, les autres, depuis, sont gérés par le Centre hospitalier Princesse Grace de Monaco. Un des malades (un Britannique de 27 ans) est guéri, un autre malade (un sexagénaire) est aujourd’hui dans un état préoccupant.

Pour éviter la propagation du virus et un nombre croissant de contamination, le Gouvernement a décidé d’opter pour la stratégie suivante : une ligne de front et une armée de réserve.

En effet, les services hospitaliers ont été réorganisés afin de faire face à l’afflux de nouveaux cas qu’il est légitimement possible d’envisager, mais également dans le souci de préserver le plus possible les équipes soignantes.

Ainsi, certains personnels continuent de travailler au sein de l’hôpital, quand d’autres sont désormais maintenus à domicile, et pourraient venir remplacer leurs collègues dans les semaines à venir.

Il s’agit tout à la fois de préserver la santé physique du personnel soignant, mais également de les prémunir de la fatigue qu’engendre la lutte acharnée qu’ils mènent contre le virus. À Monaco, on a fait le choix de substituer les marathoniens aux sprinters. Sur les 2531 personnels du CHPG, aucun à ce jour n’a été testé positif au COVID-19, et pourvu que ça dure…

Le CHPG a donc prévu deux services d’urgence, deux unités hospitalières spécialement dédiées aux cas de Coronavirus, ainsi que deux services de réanimation. Aussi, comme pour chaque cas atteint du virus, une enquête épidémiologique est menée afin de retracer les déplacement effectués par le malade et remonter aux éventuels autres cas de contamination.

La Croix-Rouge et les pharmacies solidaires

Un autre dispositif s’est amplifié, celui de la livraison à domicile de médicaments. Depuis le 18 mars, la Croix Rouge monégasque s’est mobilisée pour permettre aux pharmacies de livrer des médicaments aux personnes les plus fragiles et isolées. Antonio Asillari, qui dirige la pharmacie de Fontvieille estime entre 10 et 15 le nombre de demandes de livraison par jour.

Des salariés plongés dans l’incertitude

Toutefois, si la solidarité est de mise pour ce qui concerne la santé et les soins, certains Monégasques pestent contre l’absence de mesures clairement définies dans le domaine du travail. S’il est possible en France, par exemple, de faire valoir son droit de retrait, la situation s’avère plus difficile pour les habitants de la Principauté.

Le gouvernement n’ayant rien précisé de ce côté, et n’ayant proscrit aucune activité économique, à l’exclusion des activités s’exerçant dans des « lieux publics », certains employeurs continuent à faire fonctionner leur entreprise. Ils ont néanmoins été incités à mettre en place des dispositifs de télétravail ou de réduction d’effectifs.

Oui, mais l’article 6 permet, dans le droit monégasque, de licencier un employé sans qu’il soit nécessaire de justifier ce licenciement. Si cette mesure a l’avantage de la flexibilité, dans les circonstances particulières liées à la pandémie, il existe un risque évident d’abus, et avec lui d’injustice et d’incompréhension.

Certains employés ont donc peur de se voir licencier s’ils décident de ne pas se rendre sur leur lieu de travail, et se retrouvent donc face à un dilemme kafkaïen : soit ma santé, soit mon travail.

La mobilisation des conseillers nationaux

Lors d’une séance publique tenue ce jeudi, la conseillère nationale, Béatrice Fresko Rolfo, a demandé à ce que la solidarité soit totale.

Sans toutefois remettre en cause le bien-fondé juridique et économique de l’article 6, elle a appelé le gouvernement à s’adapter aux circonstances exceptionnelles et les employeurs à leur responsabilité et à leur sensibilité.

Béatrice Fresko Rolfo a déclaré :

« Faites de votre côté un geste humain et social dans ces temps difficiles pour tous ».

La réponse du Prince n’a pas tardé, et celui-ci a rappelé que des mesures de travail plus souples ainsi que des mesures de chômage total temporaires ont été prises. Dans ce dernier cas, l’employeur devra verser 70% sa rémunération brute au salarié, avant d’être remboursé par l’État.

En revanche, si ni le chômage total temporaire, ni les mesures assouplies ne peuvent être prises par l’employeur, ce dernier se verra contraint de motiver le refus d’un licenciement.

La question des sanctions à l’égard de l’employeur reste néanmoins en suspens…