Interview

Boris Herrmann : « Des résultats encourageants pour le prochain Vendée Globe »

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Boris Herrmann à bord du Malizia-Seaexplorer au lendemain de son retour au Yacht Club de Monaco (Photo © Romain Boisaubert/Monaco Tribune)

Le skipper allemand du Yacht Club de Monaco est revenu sur la troisième place de Malizia-Seaexplorer lors de la 14e édition de The Ocean Race, tout en se projetant déjà sur le prochain Vendée Globe, dont le départ est prévu le 10 novembre 2024.

Quel bilan tirez-vous de la course et de ces six derniers mois passés en mer ?

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Je suis très content de cette aventure. Il y a le résultat, qui est satisfaisant, mais ce n’était pas l’objectif principal. Nous voulions aussi partager cette aventure avec le public, mettre à l’honneur le projet éducatif et récolter des données pour notre projet scientifique. Nous avons réussi à promouvoir nos actions pour protéger l’environnement à travers des conférences organisées à chacune de nos escales. C’est positif.

Sportivement, avec ces résultats probants, Malizia-Seaexplorer semble définitivement bien né…

Nous avons mis le bateau à l’eau il y a seulement onze mois. Depuis sa mise à l’eau, nous avons déjà parcouru 50 000 miles, soit deux fois la distance de l’équateur. Lors du dernier Vendée Globe, nous avons tous eu des problèmes avec nos bateaux. Mais avec Malizia III, nous avons réglé certains problèmes, notamment dans les mers agitées et les vents forts.

Si on affirme que l’on veut gagner le Vendée Globe, c’est que l’on a rien compris. On ne peut pas dévaloriser cette course, la plus difficile au monde. C’est une aventure qui dépend avant tout de le mer et des conditions

Boris Herrmann, skipper de Malizia-Seaexplorer

Le bateau est désormais bien plus contrôlable. Nous avons vu certains de nos concurrents avoir de grandes difficultés dans les mers du Sud. Aujourd’hui, il est impossible d’imaginer faire le Vendée Globe sur ces bateaux-là, même s’ils sont plus rapides dans des vents à 16-18 noeuds. Malizia-Seaexplorer est le seul bateau à avoir terminé toutes les étapes. C’est très encouragent.

Depuis votre cinquième place lors du dernier Vendée Globe, les résultats sont probants. Allez-vous revoir vos objectifs à la hausse pour le prochain Vendée Globe ?

Nous sommes confiants. Nous avons imaginé ce bateau spécifiquement pour le Vendée Globe. Cet Ocean Race a été une énorme boucle d’entraînement. Nous devrions être dans de bonnes conditions dans un an et demi.

Au point de viser la victoire ?

Si on affirme que l’on veut gagner le Vendée Globe, c’est que l’on a rien compris. On ne peut pas dévaloriser cette course, la plus difficile au monde. C’est une aventure qui dépend avant tout de le mer et des conditions. Tu ne peux pas dire, je serai demain matin à 9h au sommet de l’Everest. Il y a énormément de paramètres à prendre en considération. Et puis ce n’est pas comme si il n’y avait qu’un seul concurrent qui se détache. Il y a quinze bateaux neufs et des équipes expérimentées, qui en ont développé plusieurs. Pour notre part, c’est la première fois.

Boris Herrmann et Team Malizia ont remporté la septième et dernière étape de The Ocean Race (Photo © Team Malizia)

Quelles seront les prochaines échéances jusqu’au Vendée Globe ?

The Ocean Race était l’objectif principal dans la préparation au Vendée Globe. Je peux maintenant profiter d’un an et demi de vacances (sourire). Il y aura quatre transats, dont la Transat Jacques Vabre (départ le 29 octobre prochain) que je vais disputer aux côtés de Will Harris. Je ne vais pas prendre part aux quatre courses, mes équipiers prendront la barre de temps en temps.

Quel regard portez-vous sur Will Harris ?

C’est un grand talent. Il est jeune mais il a déjà beaucoup d’expérience. C’est un leader pour l’équipe. On a vu qu’ils se sont très bien débrouillés sans moi. Will fait partie de nos équipiers qui nous aident à faire grandir l’équipe. Dans les années à venir, il pourrait très bien y avoir un autre skipper que moi sur le Vendée Globe. Cela ne me dérangerait pas d’occuper un autre rôle et d’échanger ma place avec Will. J’ai une pensée aussi pour Rosalin (Kuiper), qui a été la plus jeune skipper de la course et qui était la seule femme. Elle a fièrement représenté la voile au féminin. C’est une équipière importante, tout comme Nico (Lunven).

Comment expliquez-vous l’osmose qu’il y a eu durant toute la course avec vos équipiers ? Il paraît qu’il n’y a eu aucune dispute entre vous sur le bateau…

Tout cela est lié à notre processus de recrutement. Nous avons cherché des membres qui s’engagent pour le projet Malizia dans son ensemble et non pas seulement pour être de simple coéquipiers sur The Ocean Race. Cela veut dire qu’ils participent à toutes les discussions dans la conception et le design du bateau. Ils sont impliqués de a à z avec nous.

Si on compare les premiers résultats par rapport au dernier Vendée Globe, on constate un niveau de CO2 beaucoup plus elevé dans les océans

Boris Herrmann, skipper de Malizia-Seaexplorer

L’objectif est de faire grandir le team tous ensemble. Nous réfléchissons par exemple à un projet de nouveau bateau. Une année pour dessiner un bateau, c’est beaucoup trop court. Il faut en général plutôt 18 à 24 mois. C’est ce qu’ont fait certains concurrents, qui ont fait l’impasse sur ce The Ocean Race pour avoir une année de plus afin d’affiner leur bateau. Nous allons anticiper plus tôt son développement pour être en bonne position pour The Ocean Race 2027.

Avez-vous déjà pu récolter des données océanographiques ?

Pas encore totalement. Cela prend plusieurs années. Le processus pour mesurer la fluctuation des océans est complexe, bien plus que pour l’atmosphère. Mais si on compare les premiers résultats par rapport au dernier Vendée Globe, on constate un niveau de CO2 beaucoup plus elevé dans les océans. Nous allons attendre les résultats pour comprendre pourquoi il y a autant de différences en si peu de temps.