Comment Monaco concilie propreté, respect de l’environnement et besoins canins ?
Malgré les sempiternelles déjections canines, la Société Monégasque d’Assainissement a su diviser sa consommation d’eau par deux depuis deux ans.
Monaco, symbole de luxe et de raffinement, est également réputée pour sa propreté qui participe à sa renommée internationale. Rues et jardins impeccables, places scintillantes : la Principauté émerveille les touristes qui la découvrent. Cependant la propreté à la monégasque est le fruit d’un travail quotidien et d’une collaboration étroite entre tous les acteurs concernés.
Des témoignages qui interpellent
Pourtant, tout le monde n’est pas aussi enthousiaste que les touristes. Certains riverains se plaignent d’une propreté toute relative dans leurs rues et dans leurs quartiers. Déchets à même le sol, papiers qui volent au vent, herbes sauvages dans les massifs de la Principauté, quelques internautes déplorent une saleté de plus en plus présente. Mais ce que tout le monde s’accorde à dire, c’est que les rues de la Principauté connaissent de plus en plus de pipi et de déjections canines.
« Les déjections canines sont un vrai problème. Le territoire est exigu et il y a beaucoup trop de chiens, difficile de trouver des solutions », s’exclame un lecteur mécontent. Un autre renchérit : « Il faudrait que la SMA lave plus souvent les trottoirs, c’est certain ! » Ces témoignages, bien que ponctuels, mettent en lumière un problème qui semble toucher plusieurs quartiers de la Principauté.
Parmi les secteurs qui reviennent le plus souvent : les quartiers du Jardin exotique et Moneghetti, la place des Bougainvilliers, l’avenue Hector Otto et les alentours de la Tour Odéon.
Pour autant, malgré les critiques, nombreux sont ceux à saluer le travail de la Société Monégasque d’Assainissement (SMA) et dénoncer les comportements irresponsables des propriétaires de chiens. « La SMA fait ce qu’elle peut et on les remercie. » commente un de nos lecteurs quand une lectrice demande « un minimum de savoir vivre et de respect » aux propriétaires.
Des moyens conséquents et une adaptation permanente
Pour assurer la salubrité de la Principauté, la SMA, concessionnaire de service public chargé d’assurer le nettoiement des rues, déploie des moyens considérables. Marie Bérard, Directrice Adjointe Propreté Environnement à la SMA explique que ce ne sont pas moins de 130 cantonniers qui « travaillent du lundi au dimanche 7 jours sur 7, de 5 heures du matin à 19 heures le soir. » Armés de balais, nettoyeurs haute pression, autolaveuses, les agents sillonnent la Principauté à la recherche de la moindre saleté.
Il n’y a pas de favoritisme selon le quartier.
Mme Bérard explique qu’ « à la SMA, il n’y a pas de favoritisme selon le quartier. L’engagement des équipes et la prestation sont les mêmes au Boulevard du Jardin Exotique qu’à la Condamine ou au Port ou ailleurs. » Une réalité que partage également la Direction de l’Aménagement Urbain (DAU) puisque Laurence Marty, Adjointe au Directeur de la DAU, affirme qu’ « à aucun moment la priorité n’est donnée à un quartier. »
« On s’adapte à la fréquentation et à l’activité, aux manifestations mais aussi à la population canine. Il y a des quartiers à Monaco où il y a des concentrations de chiens donc on adapte nos lavages en fonction de tous ces secteurs. », précise Mme Bérard.
Selon une lectrice qui habite avenue des Castelans, « le problème ce n’est pas l’entretien, la fréquence de nettoyage est plus que correcte. Le gros problème, c’est la pollution due aux déjections canines qui se trouvent parfois même à quelques mètres de la porte des immeubles ! »
Pour ces aléas, un grand lavage des voiries est effectué tôt le matin à 5 heures mais ce sont ensuite les cantonniers des secteurs en question et l’équipe mobile qui se chargent d’intervenir pour des déjections laissées sur le trottoir tout au long de la journée.
L’eau, une ressource précieuse
« Il n’y a pas si longtemps les rues étaient lavées plus souvent… » déplore un lecteur, comme tant d’autres. La tempête Alex a permis une prise de conscience rapide de la rareté et de la difficulté d’approvisionnement en eau de la Principauté. Depuis et soucieuse de l’environnement et des ressources limitées, la SMA, à la demande de la DAU, a repensé ses méthodes de nettoyage.
Alors qu’il y a quelques années, tout était lavé à grande eau, aujourd’hui, les équipes s’efforcent de penser à des techniques plus économes, comme les nettoyeurs haute pression et les autolaveuses, par exemple. Ces dernières, équipées de systèmes de récupération d’eau, permettent de réduire considérablement la consommation d’eau.
« On a espacé les fréquences de lavage mais on est conscient qu’il y a des salissures à traiter tous les jours et nous avons donc équipé les cantonniers de petits karchers sur batterie qui permettent de traiter les tâches localisées. », explique Marie Bérard. Pour contrôler les consommations, chaque cantonnier est équipé d’un compteur d’eau.
D’ailleurs, pour des questions environnementales, seule l’eau est utilisée pour nettoyer les salissures quotidiennes. Quelques produits complémentaires, non nocifs, peuvent être utilisés pour les tâches difficiles comme le vinaigre sur l’urine et l’alcool ménager pour désinfecter les corbeilles.
Toujours dans un souci d’économie d’eau, la SMA utilise l’eau du Vallon de la Noix pour nettoyer les voiries. Cela permet de « d’utiliser une eau compatible avec le nettoiement de voirie et ainsi réduire l’usage d’eau potable puisque l’eau du vallon va de toute façon à la mer » indique Mme Bérard.
Les évolutions récentes ont permis de diviser par deux la consommation d’eau depuis deux ans.
Lutter contre les incivilités : un enjeu majeur
L’un des fléaux majeurs de la propreté urbaine est sans conteste l’urine et les déjections canines. Pour y remédier, la DAU a installé 200 distributeurs de sacs à déjections sur l’ensemble du territoire. Ces sacs, gratuits et facilement accessibles, permettent aux propriétaires de chiens de ramasser les excréments de leurs animaux. Ces sacs sont également disponibles gratuitement à la boutique bySMEG au 11 Allée Guillaume Apollinaire.
De plus, la Principauté dispose déjà de 900 corbeilles réparties sur tout le territoire où il est possible de jeter les sacs usagés. Quatre parcs canins ont également été aménagés, offrant aux chiens des espaces dédiés à leurs besoins. Deux urinoirs canins sont actuellement en cours d’expérimentation, Promenade Honoré II et Place des Bougainvilliers.
Des expérimentations qui manquent encore de résultats. Les résidents et les chiens n’étant pas habitués à ces nouvelles pratiques, ces derniers continuent à faire leurs besoins dans la rue. « Les parcs à chiens sont utiles. C’est important mais c’est difficile d’en installer partout. C’est pour cela qu’en complément, on généralise le déploiement des distributeurs de sacs », explique Mme Marty, Adjointe au Directeur de la DAU.
Malgré ces efforts, les incivilités persistent. Des campagnes de sensibilisation régulières devraient voir le jour dans les prochains mois pour responsabiliser les propriétaires des chiens et rappeler l’importance de ramasser les déjections de leurs animaux.
L’Unité de Préservation du Cadre de Vie de la Direction de la Sûreté Publique, facilement repérable à ses gilets bleus, veille au respect des règles et n’hésite pas à verbaliser les contrevenants. Cette unité, directement en lien avec la SMA et la DAU, joue un rôle crucial dans la lutte contre les incivilités et la préservation de la propreté de la Principauté. « Très réactifs et diplomates, nous pouvons faire appel à eux en dernier recours », ajoute Mme Bérard.
Un dialogue permanent entre la SMA et la DAU
La SMA et la DAU travaillent en étroite collaboration pour optimiser le nettoiement de la Principauté. Des réunions régulières permettent de partager les constats du terrain, d’identifier les points sensibles et de mettre en place des solutions adéquates.
Les cantonniers sur le terrain sont les plus à même de faire remonter les idées et les propositions d’amélioration et leurs voix est prise en compte par la SMA. Les cantonniers s’occupent de leur secteur prédéfini en fonction de la difficulté des tâches et de la pénibilité de la zone, ce qui prend en compte, par exemple, le nombre d’escaliers ou une grande fréquentation des lieux.
L’habitude des agents sur leur secteur encourage une relation de proximité avec les habitants et un lien fort avec eux. Alors qu’il y a plusieurs années, la doctrine était non pas de cacher mais de rendre le nettoiement des rues le plus discret possible, la visibilité des cantonniers est devenue normale.