Steven Galibert, grand vainqueur de l’Ironman de Nice, nous livre les secrets de sa réussite
Le 16 juin 2024 restera une date gravée à jamais pour le triathlète Steven Galibert, puisqu’il a remporté haut la main le célèbre Ironman de Nice. Licencié à l’AS Monaco Triathlon, il nous présente les clés qui lui ont ouvert les portes de la victoire.
Le 16 juin dernier, Steven Galibert vivait l’un des plus beaux, si ce n’est le plus beau moment de sa carrière jusqu’à présent : il est le premier à franchir la ligne arrivée sur les 4500 participants. Devant sa famille, sa compagne Marine, ses amis et les milliers de spectateurs sur la Promenade des Anglais, Steven réalise l’exploit et remporte la course en 8 heures, 40 minutes et 14 secondes.
À 32 ans, Steven est maître nageur de profession et triathlète par passion. Originaire du Tarn, il est licencié à Monaco et représente donc la Principauté lors de ses compétitions. Aujourd’hui, nous avons souhaité en apprendre plus sur ce champion. Qui est-il ? Comment s’est-il entraîné pour en arriver là ? Quelle a été la clé de son succès ? Réponses dans cette interview.
Bonjour Steven, pour commencer, parlez-nous de votre parcours dans le sport jusqu’à présent ?
Bonjour ! Alors moi j’ai commencé le sport depuis tout petit. J’ai fait 15 ans de foot, je ne suis pas du tout triathlète à la base. J’ai découvert le cyclisme avec un ami, par curiosité, puis à force de rouler on y prend goût. On augmente alors ses distances et c’est sur la distance Ironman où j’arrive le mieux à exploiter mes qualités. Cela fait maintenant 9 ans que je fais du triathlon.
Le triathlon n’est pas forcément une discipline qu’il faut pratiquer depuis son plus jeune âge. On peut, si on trouve les bonnes clés, y arriver même plus tard. J’ai commencé vers 23-24 ans. J’ai toujours eu une certaine endurance, au foot par exemple, donc je ne pars pas de zéro. Donc sur un format long comme l’Ironman ça peut fonctionner. En revanche, sur un format court, il est vrai que ces aptitudes bien spécifiques on les apprend relativement tôt. Comme en natation par exemple, où j’ai peut-être encore quelques lacunes.
Je pense que si j’arrive à prendre autant de plaisir durant mes entraînements et mes courses aujourd’hui, c’est parce que je suis arrivé tard dans la discipline et que j’ai toujours de quoi progresser.
Je vous avoue que si on m’avait dit il y a 10 ans que j’allais gagner un Ironman, je n’y aurais pas cru une seule seconde et je ne réalise toujours pas d’ailleurs. Surtout à Nice, car c’est une compétition très importante pour un triathlète.
Pouvez-vous décrire une journée type d’entraînement pour un Ironman ?
Pour les entraînements, je suis suivi par Karoly Spy depuis maintenant cinq ans et nous avons mis en place une certaine routine en fonction de mon planning de travail. Les journées ne se ressemblent pas forcément, c’est plutôt les semaines qui se ressemblent. Le lundi par exemple, c’est une journée où je travaille 9 heures, c’est donc un jour de repos à l’entraînement. J’en profite pour prendre du temps pour moi, pour entraîner des athlètes, ce qui me permet aussi d’apprendre des autres.
Chaque semaine j’ai une grosse journée où je fais entre 8 et 9 heures de sport avec une longue sortie vélo, je vais nager au lac ou en piscine et le reste de la semaine c’est 4 heures d’entraînement par jour. En résumé, 4 heures cinq fois par semaine, une grosse journée de 9 heures et un jour de repos.
Côté alimentation, j’ai pris des informations auprès d’une nutritionniste pour comprendre mes besoins spécifiques. Sur les grosses journées d’entraînement je dois bien manger car on a tendance à sauter un repas. Sinon, il n’y a pas de régime particulier à part le fait d’avoir une alimentation équilibrée avec beaucoup de légumes et de protéines.
Quelle a été votre préparation physique et mentale pour cet Ironman de Nice ?
Physiquement, j’ai commencé ma préparation le 1er janvier 2024. Cela fait au total six mois de préparation. Je m’entraîne un peu plus de 25 heures par semaine, entre 25 et 30 heures. J’ai un travail à côté donc c’est assez millimétré au niveau du rythme de vie.
Mentalement, je pense qu’il faut prendre du recul sur ses épreuves et se dire que cela reste du sport. Il ne faut pas se mettre trop de pression. Le sport doit être une valeur ajoutée, un échappatoire. Moi c’est comme ça que je vois les choses. Au départ d’une course, je me dis toujours que j’ai fait ce qu’il faut à l’entraînement et si le jour-j cela se passe bien c’est tant mieux pour moi et si ça se passe mal, je n’ai pas de regrets parce que je sais que j’ai tout mis en place pour être dans les meilleures conditions.
Qu’est-ce qui vous a le plus marqué durant cette course ?
Ce que j’ai adoré pendant la course, c’est vraiment le parcours à vélo. L’arrière pays niçois est absolument superbe. Il y a de magnifiques paysages. L’ambiance sur la Promenade des Anglais m’a aussi énormément marqué. C’était fou. Il y avait vraiment beaucoup de monde.
Sur 5 heures de vélo on a forcément des passages difficiles donc pour oublier le fait que l’on a mal aux jambes pendant 180 kilomètres, on chasse le négatif. Le paysage nous permet d’oublier la difficulté et la douleur. J’essaye vraiment de profiter au maximum car on n’a pas tous la chance de pouvoir faire du sport, il ne faut pas l’oublier et la nature nous le rend bien.
Avez-vous rencontré des imprévus ou des obstacles majeurs durant la course ?
Oui, j’ai déraillé au 45e kilomètre ! J’avoue que ça met un petit coup d’adrénaline. C’est une expérience, on se dit que tout peut arriver. On répare, on repart et on oublie. Sinon, je n’ai pas eu de moment de doute. J’ai même toujours un moment où je me sens beaucoup mieux. À chaque fois sur ce type de course, c’est entre le 120e et 130e kilomètre. C’est là où je sens que la fin de course va bien se passer.
Quand est-ce que vous avez su que vous alliez remporter la course ?
J’ai mis un moment à me dire que j’étais devant et que j’allais gagner. C’est un effort de plus de 8 heures. Jusqu’à la fin on se dit que tout peut encore arriver. La machine peut s’arrêter. J’ai vraiment eu du mal à réaliser que j’étais premier.
Je prends la première place au 29e kilomètre, mais j’y ai vraiment cru seulement à 3 kilomètres de l’arrivée. Tant que je n’avais pas recroisé le second, ce n’était pas réel. Quand je l’ai aperçu, j’ai compris qu’il y avait de l’écart entre nous et que c’était quasiment fait pour moi.
Quel a été votre sentiment lorsque vous avez franchi la ligne d’arrivée ?
Premièrement j’étais très surpris. J’avais l’impression d’être dans un tunnel car il y a beaucoup de monde. On est enfermé dans cette longue ligne droite d’arrivée. Ce qui m’a aussi beaucoup marqué c’est que ce jour-là c’était la Fête des pères et la première personne que j’ai serrée dans mes bras c’était mon papa, à l’arrivée, en lui souhaitant bonne fête. C’est vraiment quelque chose qui restera gravé.
Ensuite j’ai retrouvé ma copine. Il y a certes une banderole et une médaille de finisher mais il y a aussi les personnes qui mériteraient tout autant de lever la banderole que moi : mes proches. Enfin, 10 minutes après l’arrivée, j’ai appelé mon entraîneur pour le remercier.
Selon vous, quelle est l’ultime clé de la réussite dans le sport ?
J’ai la chance de pouvoir être bien entouré par ma compagne qui est totalement à fond dans ce projet et c’est sûrement la première clé de mon succès. On a beau s’entraîner, si on n’est pas bien entouré on ne peut pas être performant, comme j’ai pu l’être sur cette course à Nice.
J’ai également l’habitude de dire que dans l’entraînement, il faut toujours y aller de façon progressive. Être très patient. Ne pas vouloir en faire trop d’un coup, au risque de se blesser. Il faut travailler de manière progressive pour que le corps assimile tous les efforts. Je conseille alors beaucoup de patience et de la confiance en soi. Je pense que c’est ce que le sport doit transmettre.
C’est grâce au sport que j’ai pris confiance en moi. Gagner une course, atteindre ses objectifs, on prend forcément confiance en soi. C’est gratifiant, on se dit que l’on a bien travaillé pour y arriver. L’avant-course est aussi très important, il faut essayer de ne pas penser à la course. Être en famille si on le peut, essayer de libérer le stress avec ses proches. Mais la patience, c’est vraiment la clé de la réussite.
Pour terminer, qu’est-ce que l’on peut vous souhaiter pour la suite ?
Sportivement, je suis qualifié pour les Championnats du monde à Hawaï, fin octobre. Ce que l’on peut me souhaiter c’est de faire la même course qu’à Nice ! De faire la meilleure performance possible même si ce sera un endroit complètement différent, avec un climat chaud et beaucoup plus humide.
Professionnellement, j’ai une situation relativement stable. Ce n’est pas forcément dans mes projets de changer cela. Mon sport n’est pas très rémunérateur, voire pas du tout. Pour moi, cela reste une vraie stabilité financière mais également de liens sociaux de garder mon travail à côté du triathlon.