Vintimille : entre tourisme, sécurité et grands projets, le maire Flavio Di Muro, voit les choses en grand
Dans une interview exclusive, le maire de Vintimille détaille ses projets pour sa ville et les relations avec les villes frontalières françaises et Monaco.
Avec le nouveau port de Monaco installé à Vintimille, les projecteurs se braquent de plus en plus sur cette dernière ville italienne avant la France. Longtemps, lieu de prédilection pour aller au marché et trouver des produits typiques italiens pour les frontaliers Français et Monégasques, le nouveau maire de Vintimille, Flavio Di Muro, veut faire plus et souhaite changer l’image de la ville et se donne un objectif fort : « transformer Vintimille en une ville internationale. »
Nous l’avons rencontré pour mieux comprendre ses ambitions et les projets futurs qui dessinent le renouveau de la « porte fleurie d’Italie ».
Quel est votre lien avec Vintimille ?
J’ai grandi à Ventimiglia. J’ai travaillé dans diverses associations en organisant des événements et des manifestations. J’ai un profond sens civique et un fort attachement à la ville. Je l’ai toujours maintenu, même lorsque, par le passé, j’ai occupé des postes qui m’ont amené loin de Vintimille, à Gênes ou à Rome. Dans mon activité politico-administrative, j’ai toujours donné la priorité aux besoins de mes concitoyens.
Dans quelle direction souhaitez-vous mener la ville ?
Mon objectif est de transformer Ventimiglia d’une ville frontière à une ville internationale. La position géographique de la ville ne doit plus être un problème, mais doit au contraire devenir une force pour son développement. Dans cette optique, cette première année, nous avons travaillé pour améliorer l’image de la commune, qui passe également par la sécurité perçue par les citoyens et les touristes.
Notre objectif est de faire rester les touristes un peu plus longtemps
Le tourisme est notre deuxième objectif. Nous sommes une ville essentiellement commerciale, et ce grâce au tourisme de proximité des Français et des Monégasques qui viennent pour acheter des produits qui ont un coût inférieur à celui de leur pays et sont particulièrement intéressés par notre oenogastronomie. Notre objectif est de faire rester les touristes un peu plus longtemps, aussi bien les actuels que les futurs.
Aujourd’hui, les données en notre possession concernant cette première année indiquent une augmentation de 14% des touristes en ville. Plus de 25% d’entre eux sont de nationalité internationale. Ce sont des données encourageantes qui nous incitent à faire des choix stratégiques et des investissements dans le domaine du tourisme, ce que nous faisons déjà.
Vous parlez de sécurité, qu’avez-vous fait pour l’améliorer ?
Nous avons bloqué tous les bivouacs et tous les campements illégaux avec des grilles, nous avons muré les ruines abandonnées. La police municipale a été équipée de tasers à impulsions électriques. Ensuite, nous avons augmenté les effectifs de la police municipale en instituant également le service de nuit, nous avons pris des ordonnances que nous faisons respecter, nous avons bien travaillé avec le préfet en créant des dispositifs fixes et mobiles des forces de l’ordre, voire avec les militaires de l’armée.
Les actions de notre administration ont permis de gérer pour la première fois la coexistence entre la population résidente et la population immigrée
Certaines zones de la ville, qui étaient autrefois le théâtre de campements, de bivouacs et d’activités illégales, sont désormais surveillées. Il reste encore à effectuer des interventions d’assainissement, pour lesquelles nous venons d’obtenir une subvention extraordinaire du gouvernement. Enfin, nous travaillons à l’évacuation du dernier campement illégal qui reste sur le lit de la rivière.
Aujourd’hui, le flux migratoire est nettement inférieur à celui d’avant mon installation, et les actions de notre administration ont permis de gérer pour la première fois la coexistence entre la population résidente et la population immigrée.
Quels sont les grands projets en cours à Vintimille ?
Nous avons la passerelle, ce pont détruit par les inondations de 2020 qui tient beaucoup à cœur aux Vintimillais. Ce sera une passerelle moins imposante, moins coûteuse, plus rapide à réaliser et plus similaire à celle à laquelle nous étions attachés [que le dernier projet étudié ces dernières années, NDLR]. C’est l’emblème de la reconstruction de Vintimille.
Les grands projets visent à réinventer l’image de la ville pour attirer des investissements privés que nous soutenons
Nous avons l’intention de reprendre le projet de valorisation du complexe des sœurs Dell’Orto, car nous manquons d’offres d’hébergement et d’établissements hôteliers, en particulier de ceux de haute qualité. Nous avons un complexe immobilier entre le port et la ville haute qui peut être cédé à des investisseurs expérimentés pour créer un hôtel 5 étoiles.
Les grands projets visent à réinventer l’image de la ville pour attirer des investissements privés que nous soutenons, bien sûr. Le dernier en date est celui de Flavio Briatore qui a ouvert le Twiga. Vintimille est souvent citée pour des faits divers, des rixes entre migrants, mais nous avons maintenant des entrepreneurs à succès qui ouvrent des établissements et créent des emplois pour les Vintimillais.
Où en sont les projets de Campus et d’Hôtel de la Marina Development Corporation ?
D’un côté, il y a des intérêts privés, avec un projet d’intervention de très bonne qualité que nous apprécions. De l’autre, il y a des intérêts publics sur lesquels nous devons nous pencher et nous concentrer.
Je pense que, dans les prochaines semaines, nous trouverons un moyen pour intervenir dans la procédure administrative et sur les retombées pour la ville. Il y a des avis favorables sur la partie hydrogéologique des établissements, mais il reste encore de nombreuses étapes à franchir, tant pour le Campus que pour le front de mer.
Que répondez-vous à ceux qui disent que les projets n’ont pas d’intérêt pour les habitants de la ville ?
Je pense que tout investissement qui apporte de l’emploi est d’un immense intérêt. Le campus universitaire suscite un débat particulier, car les points d’accès ont un impact. S’ils veulent maintenir cette approche et prétendre que la construction de ce Campus est d’intérêt public, alors nous devons leur demander un accès gratuit ou à prix réduit pour les résidents.
Comment répondez-vous aux préoccupations environnementales liées aux projets de développement de la ville, en particulier celui du Twiga ?
Ce sont des préoccupations infondées, car le Twiga est simplement un restaurant et une déclaration préalable de travaux suffit pour ouvrir un restaurant. Le quai, où accostent les bateaux qui font des allers-retours pour amener les clients, a suscité la plupart des critiques. Il a pourtant obtenu tous les avis favorables des autorités compétentes, qui sont dans ce cas précis l’université de Gênes et la région Ligurie.
Si un scientifique, un politologue ou un philosophe pense en savoir plus sur la protection de l’environnement et veut mettre d’un côté les méchants qui veulent faire du business et de l’autre les saints qui veulent protéger les algues, il doit se confronter aux organismes compétents et à ceux qui ont les qualifications pour rendre des avis positifs ou négatifs, et les avis sont positifs.
En ce qui concerne les transports, quelles sont les nouveautés ?
En un an, nous avons fait de grands progrès sur la conception de l’Aurelia bis, une artère de liaison alternative à l’Aurelia traditionnelle pour désengorger le trafic et améliorer la circulation.
Dans mon expérience professionnelle précédente, j’ai soutenu le renforcement du voltage, c’est-à-dire l’électrification de la gare de Vintimille, pour permettre l’arrivée de trains modernes et rapides depuis le reste de la Ligurie mais qui aujourd’hui s’arrêtent à Savone. Cela permettra également un échange plus rapide avec les trains français. C’est un engagement pris par le ministère des Infrastructures et des Transports qui représente 4,5 millions d’euros. Nous espérons terminer le projet dans deux ans.
Si quelqu’un veut prendre un bus le soir depuis la Piazza della Libertà, aller au casino de Menton puis revenir, il doit pouvoir le faire
De plus, j’ai remporté un appel d’offres de l’Union européenne appelé « b-solution ». Nous sommes prêts à présenter les solutions pour une ligne de transport public local par bus, qui puisse desservir au moins Menton depuis Vintimille. Si quelqu’un veut prendre un bus le soir depuis la Piazza della Libertà, aller au casino de Menton puis revenir, il doit pouvoir le faire. Si quelqu’un de Menton veut venir faire ses courses au marché couvert le matin et revenir, il doit pouvoir le faire. Aujourd’hui, nous avons une barrière juridique qui ne permet pas à nos bus de se connecter.
Par rapport au tourisme, quel type de clientèle souhaitez-vous attirer ?
Nous mettons en œuvre une série de stratégies, d’investissements et d’initiatives pour nous ouvrir à tous les types de clientèle. Heureusement, Vintimille est un territoire vaste, avec la mer, la montagne, des paysages spectaculaires, des centres-villes, on en a pour tous les budgets et tous les âges. Il ne nous manque rien ! Une famille qui vient ici en vacances peut même se séparer : la fille va déjeuner au Twiga, le père va pêcher dans la rivière et la mère reste à la plage à prendre le soleil. Nous devons simplement prendre conscience de notre potentiel et savoir le valoriser et le communiquer au mieux.
Comment décririez-vous les relations entre Ventimiglia et Monaco ?
Excellentes ! Et pas seulement pour le port. En août, nous consacrerons l’une de nos manifestations les plus importantes, « Agosto Medievale », à notre relation avec la famille Grimaldi. Nous suivons leurs projets privés et nous avons récemment adhéré aux Sites Historiques Grimaldi.
Monaco emploie 5 000 de nos concitoyens
Nous sommes en discussion continue avec le Gouvernement de Monaco et je pense que cette année, nous avons établi une excellente relation. Monaco emploie 5 000 de nos concitoyens, les fameux travailleurs frontaliers, donc une main-d’œuvre importante, et il est normal que Monaco voie en Vintimille une plateforme de référence pour ses investissements.
Monaco nous a également apporté une contribution pour la réalisation de la passerelle. Nous pourrions également envisager de développer de nouveaux projets pour l’avenir. Il y a certainement, de leur part, une attention particulière pour la ville de Vintimille.