Rentrée judiciaire : une année placée sous la lutte contre le blanchiment d’argent et la sortie de la liste grise
Si la justice monégasque va bien dans l’ensemble, les différents discours ont mis en lumière un manque de moyens humains et une hausse des affaires enregistrées.
La rentrée judiciaire de Monaco, événement incontournable marquant le début de l’année judiciaire, s’est tenue hier dans le cadre solennel habituel. Cette journée a commencé par une messe célébrée à la cathédrale de Monaco, à laquelle ont assisté les représentants du corps judiciaire, des avocats et des autorités monégasques.
Après la cérémonie religieuse, le Prince Albert II et les autorités judiciaires se sont retrouvés au Palais de Justice pour l’audience solennelle afin d’entendre les discours de du Premier Président de la Cour d’Appel Francis Jullemier-Millasseau, celui du Président du Tribunal Suprême Stéphane Braconnier et celui du Procureur Général Stéphane Thibault.
Dans son discours d’introduction M. Jullemier-Millasseau a souhaité la bienvenue au nouveau Secrétaire d’Etat à la Justice Samuel Vuelta-Simon soulignant « sa réputation flatteuse » qui le précède.
Un manque d’effectif croissant
Le Procureur Général a salué la création, le mois dernier, d’un nouveau poste au sein du Parquet Général. Cependant, il a insisté sur la nécessité « d’autres renforts et créations de postes », face à l’augmentation constante des missions confiées à cette institution, notamment pour « répondre aux exigences de la société actuelle et du GAFI ». Il a également plaidé pour la création d’un service financier au sein du Parquet.
Au premier semestre 2024, le Parquet a traversé une « situation de sous-effectif anormale », a souligné le Procureur, rappelant que le Parquet intervient « devant toutes les juridictions pénales, civiles et administratives ». Une charge que M. Thibault a jugée « tout bonnement impossible à gérer. » La Cour d’Appel n’est pas épargnée non plus, fonctionnant actuellement avec seulement cinq magistrats, un nombre « insuffisant », selon M. Jullemier-Millasseau, qui estime qu’« un minimum de six est nécessaire. »
« Moins de magistrats et de personnels, mais des missions encore plus nombreuses dues aux nouveaux pouvoirs conférés par les lois nouvelles au Parquet Général que l’on nous demandait d’exercer, et aux demandes de statistiques, de cas concrets, et de participations à des réunions nombreuses dans le cadre de l’observation Moneyval », a conclu le Procureur quant au manque d’effectif.
Une augmentation des dossiers
Malgré ces contraintes, l’année écoulée a été marquée par une hausse des affaires traitées par le Parquet. En 2023-2024, 1628 nouvelles affaires ont été enregistrées, soit une augmentation de 15 % par rapport à l’année précédente.
L’année passée a été particulièrement meurtrière en termes d’accident et d’alcool au volant. Cela se retrouve dans les chiffres. Les affaires de conduite sous l’empire d’un état alcoolique ont augmenté de 17%. Les faits de trafic de stupéfiants ont eux aussi bondi de 37% tout comme les faits de violence (11%).
« Une plus grande efficacité de notre système judiciaire »
Pour l’année à venir, la priorité pour le Procureur sera d’intensifier les efforts dans la lutte contre le blanchiment d’argent, dans le cadre du plan d’action visant à sortir Monaco de la liste grise du GAFI et « qui demande une plus grande efficacité de notre système judiciaire en matière de lutte contre le blanchiment. »
M. Thibault a souligné que si « la délinquance de voie publique, où la présence policière peut suffire à dissuader, il n’y a de prévention en matière financière qu’avec une répression efficace. C’est le risque de se faire contrôler, arrêter, poursuivre et condamner sévèrement avec des peines de confiscation notamment, qui évitera que les criminels et délinquants qui souhaiteraient cacher et blanchir leur argent à Monaco le fassent. » Un demi-milliard d’euros a déjà été saisi cette dernière année.