Récit

Sénilité ou supercherie, une retraitée suspectée d’avoir créé de faux documents pour s’emparer des bijoux de famille

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La retraitée a été considérée comme non « accessible à une action pénale » par un expert médical © Monaco Tribune

Son état de santé a accaparé tous les débats à l’audience.

S’il y a quelques mois, c’était la fille qui se retrouvait devant la justice, il y a deux semaines c’était au tour de la mère, retraitée de 76 ans, de se présenter devant les juges et dont le jugement vient d’être prononcé aujourd’hui. Dans cette première affaire, des bijoux appartenant à la famille avaient été saisis pour une raison non précisée lors de l’audience, et la fille avait alors écopé d’une condamnation.

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Il y a deux semaines, la mère était accusée d’avoir, en mars 2023, tenté de créer un faux document pour récupérer les bijoux saisis, en se faisant passer pour leur propriétaire légitime. Si la supercherie aurait pu passer inaperçue, la vigilance du contrôleur a permis de démasquer la fraude puisqu’il avait déjà reçu les mêmes documents de la part de la fille, mais sans le nom ni la signature de la mère.

La question de la sénilité au coeur des débats

Compte tenu de l’âge avancé de la prévenue, la question de ses capacités cognitives a été maintes fois soulevée durant l’audience. Avait-elle toutes ses capacités cognitives lors de la signature de ces documents ? Selon l’expertise médicale, elle ne serait « pas accessible à une action pénale. » Un diagnostic confirmé par un autre médecin, consulté en toute autonomie par la famille pour une éventuelle mise sous tutelle.

L’interprète en langue russe répète précisément chaque question énoncée par le président du tribunal. La retraitée apparaît cependant confuse et ne répond pas toujours correctement. Le juge doit souvent reformuler les questions, et les réponses de la prévenue se contredisent. Elle affirme se souvenir avoir signé les papiers « parce que c’était vide, alors j’ai ajouté ma signature », avant de se rétracter plus tard en niant avoir ajouté cette signature.

Des doutes sur la sincérité des troubles mentaux

Dans ses réquisitions, la substitut du procureur a exprimé des doutes sur le diagnostic du dernier médecin, soulignant que l’interprète n’était autre que la fille de la prévenue. « Je pense qu’elle savait ce qu’elle disait et faisait » mais « elle était en mission affective pour sa fille mais elle ne l’a pas compris parce qu’elle servait ses intérêts. »

La substitut du procureur « ouvre la possibilité de poursuivre la fille pour abus de faiblesse pour avoir envoyé sa mère récupérer les bijoux. »

Une défense commune : la surprise

Dans cette affaire, la mère et la fille semblent avoir adopté le même procédé de défense, selon la substitut du procureur : d’abord nier les faits, puis feindre la surprise ou le surmenage une fois confrontées aux preuves. La substitut du procureur a ironisé en parlant d’une « altération très magistrale et familiale. »

Elle a également rappelé que la fille avait « découvert » qu’elle possédait des appartements à Moscou et n’avait également « pas conscience que toutes les femmes qui entraient dans ses appartements étaient des prostituées. » 

Lorsque le président a demandé à la mère de préciser ses revenus, elle a mentionné 200 € par mois, omettant de signaler qu’elle détenait plusieurs biens immobiliers en France via une SCI.

« Ce qu’elle vous dit n’est pas fiable. Vous avez une femme qui vous répond ce qui lui passe par la tête. Aujourd’hui, elle est démente », assène l’avocat en guise de défense.

Après délibération, le Tribunal correctionnel de Monaco a relaxé la mère, l’expertise médicale l’ayant diagnostiquée irresponsable de ses actes.