A la prison de Monaco, un détenu accusé de violences sexuelles sur un de ses compagnons
Les deux prisonniers étaient pourtant amis jusqu’à ce que les violences éclatent.
Même derrière les barreaux, les condamnations peuvent continuer de s’accumuler. Un détenu de 58 ans, Monsieur V., a récemment comparu devant la justice après avoir été accusé de violences avec arme par un autre détenu, Monsieur C., qui s’est vu prescrire sept jours d’ITT.
Le prévenu, serein et posé, se présente à la barre. La victime, quant à elle, est absente. Selon son avocat, Me Cheynut, Monsieur C. est retourné à son domicile dans le nord de la France après avoir purgé sa peine et n’a pas les moyens financiers de se rendre à l’audience.
Deux compagnons au train de vie bien rôdé
Les deux hommes, tous deux condamnés à de lourdes peines, partageaient une routine au sein de la prison. Jouant, mangeant ensemble, ils occupaient même des postes d’auxiliaires : l’un nettoyait, l’autre repeignait les murs.
Mais leur cohabitation s’est fortement détériorée après que Monsieur V. a été accusé de viol et de violences par son « ami ». Si l’accusation de viol a été écartée lors de l’instruction faute de preuves suffisantes, les faits de violences restent au cœur de l’affaire.
Une altercation au scénario flou
Les événements remontent au 25 septembre 2021, à 14 heures. Monsieur C. faisait sa gym dans sa cellule lorsque Monsieur V. serait entré pour lui demander de nettoyer après ses travaux de peinture. Les versions divergent. Selon le prévenu, Monsieur C., ouvertement homosexuel, lui aurait fait des avances l’aurait invité à glisser sa main dans son pantalon. Inversement, la victime affirme que Monsieur V. se serait assis en fumant un cigare, lâchant une remarque obscène tout en l’observant faire sa gym.
Là où les récits convergent c’est que Monsieur V. retourne dans sa cellule sans rien qu’il se passe face au refus des deux, et Monsieur C. reprend son exercice physique. L’accalmie est de courte durée. Selon la victime, après quelques minutes, elle aurait été poussée violemment contre une fenêtre, plaquée au mur par une main sur sa nuque et menacée de recevoir « une chevrotine dans le c** » si elle ne « fermait pas [sa] gueule. » Elle décrit également une agression à l’arme blanche et des violences sexuelles. Elle aurait également ressenti un objet pointu s’appuyer contre son dos et descendre jusqu’aux fesses. Son pantalon aurait été baissé et l’objet pointu inséré. Le prévenu l’aurait ensuite forcé à lui faire une fellation.
Suite à cet épisode, la victime serait restée prostrée et ensanglantée après le départ de son bourreau. Sept minutes s’écoulent puis son premier réflexe est de courir sous la douche.
Des preuves contestées
Alertée par l’état de Monsieur C., l’administration pénitentiaire constate des blessures : une au front qui résulterait de la projection contre la fenêtre, une au crâne qui proviendrait de la fellation forcée et une autre dans le dos que lui aurait fait l’objet pointu qui ne serait nul autre qu’un couteau de cuisine. Toutefois, aucune trace de blessure au niveau anal n’est relevée. Selon l’expert, la plaie au dos reste superficielle et « ne montre pas l’intention de blesser. »
Monsieur V. réfute les accusations, le prévenu a du mal à expliquer ce revirement chez son compagnon de prison. Pour lui, il s’agit d’une manipulation destinée à obtenir une remise de peine, bien que l’avocat de la victime affirme qu’aucune démarche en ce sens n’a été entreprise.
L’ADN à la rescousse
« Je n’ai jamais touché à ce couteau », se défend l’accusé pendant la première audition auprès de la police. Si aucun ADN du prévenu n’a été retrouvé sur les vêtements de la victime et vice-versa, de l’ADN du prévenu a bel et bien été retrouvé sur le couteau.
L’avocat du prévenu, Me Gamerdinger, explique cela parce qu’ils avaient l’habitude de partager les repas et la vaisselle. Par ailleurs, aucun ADN n’a été retrouvé dans la bouche de la présumée victime malgré la fellation forcée. Pour Me Gamerdinger, il s’agit clairement « d’une opération réfléchie. »
D’autres amis avec qui ils partageaient le couvert se sont pourtant rangés du côté de la victime après l’incident. Le prévenu explique cela par l’habitude du groupe à aller faire le « hammam » dans les douches, nom de code pour des relations sexuelles entre prisonniers auxquels Monsieur V. ne souhaitait pas participer.
Des profils psychologiques peu flatteurs
Les experts psychiatres dressent le portrait peu flatteur des deux hommes. La victime, selon eux, est qualifiée de « borderline, égocentrique et manipulatrice » en plus d’avoir tendance à se victimiser. Il souffrirait, cependant, d’un stress post-traumatique.
Le prévenu, lui, est présenté comme un pervers narcissique à tendance psychopathique qui ne supporterait pas le regard négatif des autres et aurait une difficulté à supporter l’autorité. Condamné à 15 ans de prison pour viol et tentative de meurtre.
Une peine alourdie ?
Pour le substitut du procureur, les faits sont clairs : « Les blessures sont parfaitement compatibles avec le récit de la victime. » Il trouve, par ailleurs, « hallucinant de pouvoir s’imaginer que la victime est pû s’infliger ces blessures lui-même. » Il requiert 18 mois de prison supplémentaires à l’encontre de Monsieur V.
L’affaire a été mise en délibéré au 17 décembre.