Récit

Violences au travail : une altercation entre collègues tourne mal

tribunal-de- Monaco
Un conducteur d'engins, jugé pour violences, s'effondre à la barre et présente ses excuses à sa victime © Monaco Tribune

La victime, qui travaille dans la même société, dénonce des actes « totalement gratuits ».

Le 3 décembre 2024, à Menton, un conducteur d’engins pour la SMA, a comparu devant le palais de justice de Monaco pour des violences ayant entraîné une incapacité temporaire de travail (ITT) de six jours. Les faits remontent au 15 février dernier, à 4 heures du matin. Monsieur C., excédé par ce qu’il considérait comme un « travail mal fait », aurait agressé verbalement son collègue, Monsieur A., ​​avant de le bousculer avec ses mains, au niveau des épaules. Un témoin, présent sur les lieux, parle d’une « forte bousculade ».

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« Il y a eu un différend entre nous »

Face au président, Monsieur C. a tenté de s’expliquer : « Ce jour-là, je n’étais pas très bien. J’ai eu des interventions assez dures, il manquait du matériel. J’ai fait remonter les informations, j’étais fatigué de cette situation. Je voulais que ça s’arrête. Je suis parti dans une dépression, ça fait 30 ans que je travaille. Il y a eu un différend entre nous. J’ai refusé de lui serrer la main et il m’a insulté ». Monsieur C. a ensuite expliqué : « En aucun cas, je voulais faire de mal ». Avant de conclure : « Je me suis excusé, j’ai fait le nécessaire pour ne pas en arriver là. »

De son côté, Monsieur A. a livré sa version des faits : « Je connais pas bien ce monsieur, il y a eu du changement. Je suis arrivé pour lui dire bonjour et il m’a répondu : «Non, casse-toi, j’ai pas envie de dire bonjour, rentre chez toi, casse-toi », gratuitement, je n’ai rien fait ». Il poursuit : « Il m’a pris avec ses deux poings par les vêtements. Il m’a fait pleurer comme un bébé, Monsieur le Président. J’ai jamais eu de problème avec le tribunal ni en France, ni à Monaco. Moi aussi j’ai mes problèmes, mais je ne vais pas frapper mes collègues. » L’avocate de Monsieur A. a insisté sur la nécessité d’excuses sincères, qualifiant les faits de « violences totalement gratuites ». Sans demander de dédommagement financier, la victime a simplement réclamé le versement d’un euro symbolique.

« Il a craqué émotionnellement »

L’avocat de Monsieur C., Me Campana, a pris la parole pour souligner la personnalité et les circonstances atténuantes en faveur de son client : « Il n’est pas armé pour vous répondre, pour se défendre. Il s’exprime mal, mais il est sincère dans ses excuses ». Me Campana a décrit Monsieur C. comme un travailleur acharné, titulaire de la médaille d’honneur du travail après 30 années de carrière irréprochable : « C’est un travailleur qui aime le travail bien fait », a t-il expliqué, insistant sur les tensions croissantes au sein des différentes équipes de la société et les conséquences d’un « choc générationnel ».

L’avocat a également évoqué l’usure mentale accumulée par son client, exacerbée par une intervention traumatisante en avril 2023. Cet accident, dans le tunnel Louis II, a entraîné la mort de trois femmes. En rentrant de soirée du Larvotto, le véhicule, roulant à 156 km/h, a percuté le muret de l’auditorium Rainier III. Ce jour-là, Monsieur C. avait été appelé sur les lieux de l’accident, où il avait dû ramasser les « débris humains » sans matériel adéquat. Son véhicule n’était pas équipé comme il le devrait, un manquement commis par l’équipe précédente. « Il a craqué émotionnellement » indique Me Campana. Enfin, l’avocat a détaillé les démarches entreprises par son client pour se contenir et soigner son état de santé fragile : « Il a tout de suite pris des traitements, des médicaments, des séances chez des spécialistes. Il en a pris conscience. Cet événement est exceptionnel ». Cette plaidoirie, empreinte de compassion et de reconnaissance pour le parcours professionnel de Monsieur C., a bouleversé ce dernier. Il s’est effondré en larmes lors de sa dernière intervention à la barre, incapable de contenir son émotion face au rappel des faits. 

Le procureur a, lui aussi, relativisé les faits, estimant que l’ITT de six jours pouvait paraître exagérée : « Je ne constate pas de lésions. Il n’est pas question ici de violences physiques graves», tout en rappelant que Monsieur A. était bien victime dans cette affaire.

Le tribunal a reconnu la culpabilité de Monsieur C. Il a été condamné à 800 euros d’amende, à verser un euro symbolique à Monsieur A. et à payer 800 euros pour les frais d’avocat.