Interview

25 ours en peluche mis aux enchères au profit de l’association Monaco Disease Power

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Lors de la première édition en 2023, 25 peluches géantes ont été vendues aux enchères © Paul Charoy / Monaco Tribune

Cette vente, pour le moins originale, aura lieu demain à Monaco, et est ouverte à tous. Venez nombreux !

Micha, Brice, Gordon, Louis, Kelly… Nous ne listons pas ici les prénoms les plus donnés à Monaco l’an dernier. En réalité, il se prépare, en Principauté, un projet aussi ambitieux qu’original.

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Ce vendredi 20 janvier, à 15h30, devant le 3 avenue Prince Pierre à Monaco, se tiendra une vente aux enchères… d’ours en peluche. Une idée imaginée il y a à peine un mois par Karelle Traverso, heureuse propriétaire des 25 peluches géantes qui seront vendues, et que vous avez peut-être aperçues en flânant dans les rues de la Principauté.

« J’étais en train de dormir, quand je me suis réveillée dans la nuit, raconte-t-elle. J’ai dit à mon mari : « je veux vendre mes ours aux enchères, au profit d’une association ! » Il m’a dit : « allez, rendors-toi. » »

C’est la première fois, en cinquante ans de carrière, que je vends des ours en peluche aux enchères

Simon de Pury, commissaire-priseur

Mais coup de théâtre, ou coup du destin : seulement trois jours plus tard, Simon de Pury, commissaire-priseur et résident à Monaco, se promène dans la rue et passe devant la vitrine de Karelle et de son époux, toute d’ours en peluche vêtue.

« J’ai posté une photo sur Instagram, nous révèle-t-il. Plusieurs amis de Karelle, que je ne connaissais pas encore, l’ont vue et elle m’a envoyé un message pour me demander si je serais disponible pour une idée folle : vendre les ours au profit d’une association. J’ai tout de suite dit « oui. » »

Et après cinquante ans de carrière et des centaines de ventes dans le monde entier, Simon de Pury le confirme : c’est la première fois qu’on lui demande de vendre des ours en peluche. « Je pense que ce sera vraiment une vente particulière, confie-t-il. Les ours en peluche, c’est symbolique. Chaque enfant s’attache à un animal en peluche, et très souvent, c’est un ours. C’est ensuite cette peluche qui les accompagne pendant toute leur enfance, certains la gardent même à l’âge adulte. Ces ours sont chargés d’énergie, chargés d’amour, mais aussi porteurs de leurs chagrins. C’est ça qui est beau : au fond, la passion de Karelle pour les ours, qu’elle a depuis fort longtemps, va se transformer en une énergie qui va soutenir le projet en faveur de l’association. »

Des parrains de prestige pour les ours en peluche

Et la vente sera d’autant plus extraordinaire que les ours ne sont pas de simples peluches. Chacun est parrainé par une personne ou une entreprise de la Principauté. Les parrains et marraines ont ainsi eux-même choisi le prénom de leur ours, l’ont habillé et offrent un cadeau supplémentaire pour l’heureux gagnant de l’enchère.

La bijouterie Cartier, le restaurant Louis-XV, le peintre Franta, la CMB, La Môme de Monac, Bentley, APM, Komo, l’Hôtel Hermitage… Les ours ont tous de prestigieux parrains et marraines, et leur identité propre. Les enchérisseurs pourront donc potentiellement repartir avec de très beaux lots, comme des bijoux, des invitations à dîner, ou même une promenade dans une belle Cadillac rouge décapotable de 1955, ayant appartenu à Jean-Paul Belmondo.

De quoi aider un peu Simon de Pury à estimer les ours. « J’espère que les gens vont miser avec énergie et enthousiasme, mais nous verrons vendredi après-midi à combien ils vont se vendre », précise-t-il.

Et qui dit « vente particulière » dit aussi « acheteurs particuliers. » Simon de Pury espère que l’événement attirera tout le monde, et pas seulement les habituels collectionneurs, que l’on retrouve dans les ventes plus classiques. « Il ne faut pas que les gens se sentent intimidés, au contraire, il faut qu’ils se sentent bienvenus. » Plusieurs surprises sont d’ailleurs au programme, pour rendre l’instant convivial.

« Il y aura notamment une « teddy box », où les gens pourront donner ce qu’ils veulent, en fonction de leurs moyens. Je pense que c’est bien, humainement, que les gens ne soient pas juste spectateurs : ils pourront faire quelque chose. (…) Les gens ont souri pendant un mois en passant devant les ours de la façade, ils vont sourire pendant le spectacle », ajoute Karelle.

Objectif : construire un bâtiment inclusif pour les adultes handicapés

Et si tous ses ours ont une place dans son cœur, Karelle en évoque un, particulièrement important à ses yeux. Le numéro 18, prénommé Del’Kaxelle. Un mélange des prénoms de Karelle et de ses deux sœurs : Delphine et Axelle. Le numéro 18, lui non plus, n’est pas choisi au hasard, puisque c’est à cet âge que Karelle a malheureusement perdu sa sœur aînée, Delphine.

Et c’est en pensant à Delphine, qui était en situation de handicap moteur et mental, que Karelle a voulu organiser cette vente aux enchères. Et c’est tout naturellement vers l’association Monaco Disease Power qu’elle s’est tournée.

Présidée par Muriel Natali-Laure, Monaco Disease Power propose tout un lot d’activités à destination des personnes en situation de handicap, avec deux maisons d’accueil sur la Côte d’Azur et un centre de jour à Monaco. Le choix de Karelle, aiguillée par une amie, était donc tout indiqué.

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Monaco Disease Power organise des activités avec ses adhérents – DR

Ça fait plaisir, humainement parlant, de rencontrer des personnes qui s’intéressent à ces enfants non-ordinaires et à leurs familles

Muriel Natali-Laure, présidente de Monaco Disease Power

« C’est mon moteur, Delphine m’accompagne, elle est là. Je pense que je n’avais pas encore fait le deuil de ma sœur, et cette vente, je sens que c’est ma façon de faire ce deuil, nous explique-t-elle, très émue. Le handicap peut être bien pris en charge chez les jeunes, mais une fois qu’ils sont adultes, c’est plus compliqué. Pour des parents qui accompagnent leur enfant handicapé, ne serait-ce qu’aller au restaurant est une épreuve. (…) Les ours, les gens n’ont pas peur de les regarder. Alors que pour les enfants handicapés, on détourne le regard. J’ai juste envie qu’on change le regard des gens à travers ces ours. (…) J’ai pris mon téléphone, j’ai appelé Muriel, on s’est rencontrées et c’était comme une évidence. »

« J’ai trouvé cette démarche extrêmement gentille et touchante, témoigne, de son côté, Muriel Natali-Laure. C’est aussi une reconnaissance de l’association à Monaco, et la proposition est sympathique et originale. Et puis, l’ours a un lien avec l’enfance. (…) Ça fait plaisir, humainement parlant, de rencontrer des personnes qui s’intéressent à ces enfants non-ordinaires et à leurs familles. »

C’est donc entourée d’un petit groupe composé de jeunes accompagnés et de leurs encadrants que Muriel sera présente vendredi.

Elle et Karelle, qui a décidé d’intégrer le bureau de l’association, espèrent réunir deux millions d’euros pour financer l’ouverture d’un bâtiment inclusif, pour les jeunes adultes qui n’ont plus leur place en institut pour enfants, et qui n’ont pas encore de place en centre pour adultes.

Avant même que les enchères ne commencent, 2 600 euros ont déjà été donnés. Un premier pas vers l’ouverture de cette maison qui, quand elle verra le jour, et Muriel le promet, portera le nom… de Delphine.